La chanson Natural’s Not in It de Gang of Four explore les thèmes socio-politiques du consumérisme et du capitalisme. Sortie en 1979, elle est une satire acérée de la société contemporaine, marquée par un consumérisme galopant, les médias de masse et le néolibéralisme naissant. Elle critique la marchandisation de la vie et le rôle du capitalisme dans l’atomisation et l’aliénation des individus. Gang of Four interroge l’idée que la nature humaine serait vouée à la consommation et à la conformité, suggérant que la recherche incessante de nouvelles marchandises comble artificiellement un vide existentiel.
Mon article précédent (David Bowie - I'M Afraid Of Americans) aborde le même thème, cette fois se concentrant plus sur la source géographique de ce consumérisme capitalistique : les États Unis d'Amérique. Dix-huit ans auparavant (1979 - 1997), les Gang Of Four en parlaient donc déjà.
Le groupe, influencé par des courants comme le féminisme, le punk rock et le marxisme, s’est formé en réaction à cette société de consommation. À travers ses sonorités distinctives et ses paroles provocantes, il a capté l’attention de générations de fans et d’activistes sociaux. Natural’s Not in It incarne ce rejet des normes imposées, invitant chacun à résister à l’assimilation et à embrasser son individualité. Cette critique sans compromis de la culture consumériste est une remise en question de la normalisation de la consommation comme état naturel de l’existence.
À sa sortie, la chanson a suscité des réactions mitigées, mais elle est devenue un classique du post-punk et un hymne de résistance à la culture consumériste. Elle pose la consommation comme une construction artificielle plutôt qu’une nécessité naturelle, et prône la libération des individus de ces contraintes culturelles. Gang of Four, originaire de Leeds, a marqué l’histoire musicale en infusant dans le punk rock une critique sociale et politique. Son premier album, Entertainment!, est souvent cité comme l’un des meilleurs premiers albums de rock, et Natural’s Not in It est l'une de ses pièces les plus emblématiques. Son message incisif et ses sonorités distinctives ont influencé de nombreux artistes dans les genres punk, rock indie et alternatif, inspirant une génération.
Le film de Sofia Coppola Marie Antoinette (2006) a inclus cette chanson dans sa bande sonore. Les paroles tranchantes sur l’amour marchandisé se sont bien accordées à la représentation du matérialisme du film, soulignant l'intemporalité du message de Gang of Four.
Le nom de Gang of Four s’inspire de la faction communiste chinoise connue sous le nom de Gang of Four qui détenait le pouvoir dans le pays dans les années 1970. Le groupe visait à critiquer le système de gouvernement et les structures de pouvoir qui le soutenaient. Les Gang of Four (Jon King, Hugo H. Burnham, Dave Allen et Andrew Gill) sont de Leeds, et leur premier album Entertainment! est considéré par certains comme un des meilleurs débuts du rock. Natural’s Not in It critique de manière incisive la culture consumériste et la marchandisation du désir humain.
Elle explore les façons dont le capitalisme s'insinue dans nos loisirs, nos amours et notre rapport à nous-mêmes. Sa pertinence semble s’intensifier à notre époque dominée par les réseaux sociaux et le lifestyle branding, le m'as-tu-vu omniprésent des influenceurs. À propos de ces derniers, ils exploitent le suivisme ambiant; le pire selon moi n'est pas tant eux que le panurgisme servile, délibéré et volontaire qui les fait vivre...
Natural’s Not in It stigmatise la séduction capitaliste, et se gausse avec cynisme du fait que même nos désirs et relations les plus intimes sont soumis aux dynamiques de marché. La phrase Ideal love a new purchase suggère que l’amour romantique a été réduit à une simple marchandise à acheter et à vendre.
Le market of the senses illustre en outre comment nos expériences sensorielles elles-mêmes ont été marchandisées. La chanson ne critique pas seulement la façon dont nous consommons, elle met en exergue comment nos sensations mêmes sont filtrées par le consumérisme.
Dream of the perfect life revient et revient comme si c'était le Graal entêtant, montrant l’insatisfaction perpétuelle fabriquée par la culture consumériste. C'est la poursuite incessante d’une existence idéale, véhiculée par la publicité, par l'image projetée par les blockbusters cinématographiques, qui instille chez le consommateur un état de désir constant. Ce mirage tient aux Economic circumstances considérées encore comme favorables à une époque à peine sortie des Trente Glorieuses. Mais en chantant Remember Lot’s wife, comme une parabole de l'obsession matérialiste, Gang Of Four évoque la destruction qui s’ensuit.
Pour rappel, dans la Bible (Genèse), le destin fut fatal à la femme de Loth. Deux anges arrivèrent un soir à Sodome, où ils avaient été invités à passer la nuit dans la maison de Loth. Au matin, ces anges l'exhortèrent à fuir avec sa famille, afin d'éviter la catastrophe imminente qui allait anéantir la ville. Les anges firent sortir Loth et sa famille de la ville, en leur ordonnant : « Fuyez pour sauver votre vie ! Ne regardez pas derrière vous...» Derrière son mari, la femme de Loth céda à la tentation et regarda en arrière vers Sodome, et fut changée en une statue de sel.
La critique dans Natural’s Not in It parle aussi de nos interactions humaines, qui ne seraient plus que des relations of power, où chaque geste est intéressé, en quête de rétribution : We all have good intentions, but all with strings attached montre l'ironie de notre faux altruisme au sous-entendu capitaliste. Derrière nos actions les plus bienveillantes, nos motifs sont égoïstes.
La chanson nous dit que le rêve de perfection n'est qu'un mirage, que ce paradis (heaven) n'est que factice. Le heaven n'est pas le bonheur consumériste.
Les paroles Repackaged sex keeps your interest sont scandées et répétées, des décades avant que l'industrie du sexe n'explose, au point que ce sujet représente maintenant plus ou moins le quart des recherches sur internet.
Les auditeurs de l'époque et même nous aujourd'hui sommes invités à nous libérer de ces chaînes consuméristes.